Garfield et les mèmes

Quand une bd est complètement déstructurée par le net.

C’est la lecture du blog de Laurel (oui… je lis toujours le blog de Laurel, ça doit faire plus de 10 ans maintenant) dans lequel elle visite le Studio Garfield qui m’a fait se poser la question « mais depuis combien de temps cette bd est diffusée déjà? » et d’un seul coup, je me suis rappelé qu’effectivement, Garfield en tant que personnage de la culture populaire américaine, avait fait l’objet de nombreux mèmes. Il est assez marrant de s’apercevoir que la plupart de ces mèmes consiste à pointer du doigt la répétitivité de la série, mais surtout de faire de la création en enlevant, en modifiant et en torturant le matériel de base à tout bout de champs.

Garfield

Garfield est un « comic strip » en 3 cases (pour les pages quotidienne, les pages du dimanche pouvant être plus longue) publié depuis le 19 juin 1978. Son créateur Jim Davis avait alors 33 ans et constatant que sa dernière bande dessiné « Gnorm Gnat » l’histoire d’un insecte aux commentaires sarcastique, ne se vendait pas très bien, il pris conseil sur un éditeur et décida de faire du personnage principal un gros chat, Garfield, en s’inspirant du caractère très bougons de son propre grand père, James A. Garfield Davis. Le comic-book qui a connu un petit succès avec le temps s’articule principalement autour de trois personnages:

Garfield :

Un gros chat fainéant, grognon, qui déteste le Lundi, est constamment en opposition avec son maître et nourris une passion pour les lasagnes. Il déteste bosser, ne chasse pas les souris et préfère mettre son énergie à la destruction du moral de son maître, Jon Arbuckle.

Jon Arbuckle :

Auto-parodie de Jim Davies (ou plutôt de ce qu’il était, Davies approchant de l’âge de 70 ans) Jon est un personnage gaffeur, loser avec les filles, assez déprimé de sa vie. Sa seule compagnie est celle de Garfield et d’Odi, et Davies explique lui-même que Garfield ne parle pas et que les bulles ne sont que ce que Jon imagine que le chat est en train de penser.

Odie :

Le compagnon et souffre douleur de Garfield. Ce chien est constamment joyeux quoiqu’il arrive.

Le comic book a remporté un grand succès et trois ans après la création de la bd, Davies fonde déjà son propre studio. A ce jour le comic book est vendu dans 111 pays et a été adapté en petit téléfilm, en plusieurs films de ciné et Direct-to-video, et en une série animé. Il y a d’autres personnages et d’autres éléments autour de Garfield, mais… vous pouvez lire Wikipédia, ça sera tout aussi instructif.

Garfield go back to bed

« Garfield, repars au lit »

Tout à commencé avec ce sketch qui a longtemps circulé sur le net et nommé « Garfield go back to bed » (« Garfield, repars au lit ») où Garfield regarde Jon, puis, Jon récupére le même regard que Garfield.

A l’origine, il s’agit juste d’un gag de Garfield :

« Garfield repars au lit »
« Je ne peux pas »
« Qui donne des cadeaux au père noël ? »

Et le gag fut dérivé jusqu’à l’absurde à la manière d’un Weegee, dont le simple visage change celui qui le regarde :

Et c’est ainsi que l’on remélangea Garfield avec d’autres mèmes

Imma firin mah lazer

Dolan

« Alors, Garfield, tu as de la place pour le dessert ? »

« Lis repars au lit »

« Tu pense à ce que je pense ? »

« Luigi repars au lit »

« Légolas qu’est ce que tes yeux d’elfes voient ? »

Et c’est ainsi qu’arriva Realfield, où l’idée de remplacer Garfield par un chat sans bulle, afin de montrer que Jon est sévèrement siphonné de la tête.

« J’ai un problème, mon rencard à la possibilité de devenir invisible. » « Poof »

« Garfield tu veux quoi avec tes bolognaises. »

« Et qui va me faire un grand sourire ? »

« Touche ma nourriture et tu es mort. »

« Il y a un truc naze avec mon pantalon. »

« J’ai trouvé une pièce dans le sèche linge »

« Il va falloir que je me rende à l’évidence » « Je ne serais jamais à mon plus haut potentiel » « Et en QUOI est-ce drôle ? »

Garfield Minus Garfield

« Je ne suis pas pathétique »

« Le suis-je ? »

Sur le site Garfield Minus Garfield, l’auteur Dan Walsh va plus loin. Et si on enlevait carrément le chat qu’est ce que ça donne ? Et bah, ça donne quelque chose de particulier, sur la vie d’un personnage assez schizophrène :

« Je vais à un rencard imaginaire ce soir ! »

« Ha, je ne supporte pas ce bruit. »

Ou bien, des cases justes étrangement vides :

Ou des pages tout simplement déprimantes :

« J’ai fait des choses dans la vie que je regrette »

« Je ne trouve rien d’intéressant à dire »

« Je suis tellement déprimé »
« Je ne suis pas sortit avec quelqu’un depuis des mois. »
« Il faudrait peut-être que je rappelle Kimmy. »

Et étrangement d’autres strips semblent renvoyer à la masturbation :

« Il y a un truc bizarre avec mon pantalon. »

« J’ai une crampe à la main »
« Que dois-je faire ? »

L’initiative fut saluée par Jim Davis lui même qui détournera lui-même certains de ses strips et fera publier l’essentiel des détournement de Dan Walsh dans la bd « Garfield Minus Garfield » publié dans sa propre maison d’édition.

« Je pense que mes doigts de pieds sont jaloux de mes doigts car ils ne peuvent pas pointer du doigt les choses. »

« C’est une carte de noël de Miss Feeny. »
« Avec un ordre de restriction à l’intérieur. »

« Quel est le but de ma vie ? »

» « Je suis tellement déprimé, c’est déprimant »
« Je pense que je vais sortir et me tirer une balle dans la tête. »

Certains passages brise presque involontairement le 4eme mur :

« Vous pensez que je suis stupide, n’est ce pas ? » « Pourquoi vous me regardez comme ça ? »

« Vous entendes toujours ces voix bizarres dans votre tête ? »
« Une voix qui vous dit de faire quelque chose de fou et de sauvage. »
« Je vais porter un kilt. »

Un rigolo s’est même amusé à effacer Garfield d’un dessin animé de Garfield (le travail est vraiment impressionnant…) transformant « Garfield’s Thanksgiving » en « Arbuckle’s Thanskgiving »

Le travail est tellement célèbre que College Humor s’est même amusé à l’adapter en live en enlevant Garfield du « film » Garfield. ou cette personne qui recréera quelques strips :

Le concept a connu des copies, comme Peanuts sans Snoopy (attention ce site contient une image effrayante) de ne garder QUE Lucy dans Peanuts, de faire des épisodes de l’Inspecteur Gadget où celui-ci n’est pas là d’enlever Calvin de Calvin et Hobbes ou de supprimer le chien bleu d’une série pour enfant. Bon, cela donne à peut-près le même résultat : on a l’impression d’avoir une collection de psychopathe, peut-être sauf pour l’inspecter Gadget qui donne l’impression d’avoir une série d’action pour enfant avec une enfant et son chien.

Square Roots of Minus Garfield

« Attention aux chats »
« Les chats sont méchants »
« Vous voyez ? »

Et si on tentait d’aller bien plus loin dans l’expérience d’enlever tel ou tel truc, qu’est ce que ça donne ? En repartant de cette idée, on obtient Square Roots of Minus Garfield.

On enlève Liz, la petite amie de Jon.

« Hmmm »
« Tu pense que j’aurais l’air mignon si je laissais pousser. »
« Ho, c’est mignon »
« Bisou »
« haa…. »
« Et pourquoi pas un petit. »

On ne garde que Odie :

On rajoute un Garfield

« Garfield, tout ce à quoi je peux penser c’est à Liz. »
« Je n’arrive pas à penser à autre chose. »
« On voit ce que tu veux dire. »
« On arrive pas à penser à autre chose que ce jambon dans le frigo. »

On mixe trois strips de Garfield ensemble (une case début, une case milieu, une case fin) :

« BURRRRRR »
« Mon dieu, Garfiled. Je pensais que c’était une tronçonneuse qui coupait un arbre mais c’était juste toi en train de manger. »
« Noix de Sycamore. »

Et évidemment, on en arrivé à l’évidence même : Garfield sans mots :

et évidemment à Garfield sans aucun personnage :

A vrai dire, passé ces considérations, les propositions permettent de créer de nouveaux gags, certains totalement proches de la série :

« Souris Jon ! »
« Et tu sera comme moi…. »
« Ahhh !!! »

Ou bien de devenir plus métaphysique :

« On a un mouvement » « Je me demande si Charlie Brown pourrait avoir un chat ? »
« C’était Mr Brown au téléphone. »

Ou de prendre toutes les cases où Garfield est légèrement Hors personnage :

« Il a fait quoi ? » « J’ai été très occupé »
« …tous les jours à chaque moment. »
« Hey, je suis gros, et alors ? »
« J’ai parcouru le monde entier ! »
« J’ai perdu du poid. »
« Ca n’est pas ce jour d’anniversaire qui me rendra plus déprimer, ça non. »
« Hey »
« C’est vraiment agaçant. »

Où on devient franchement plus noir :

« Pauvre de moi. »
« Quel après midi pourri. »
« Il fait sombre , pluvieux et il y a rien à la télé »
« Je rêve d’une prairie ensoleillé et du bon temps. Il me faut un moyen de m’échapper d’ici. »
« Mais, c’est vrai, j’en ai un. »

L’expérience déconstructiviste et très « OuBaPoienne » peut aller parfois vers l’image artistique :

L’expérience est intéressante, même si le site est énorme (près de 1537 propositions sont faites)

Autres Parodies de Garfield :

Avant même l’arrivée de « Garfield Minus Garfield » des parodies de Garfield avait vu le jour, comme Conan & Garfield (où ce qui se serait passé si Conan le Barbare était le propriétaire de Garfield.)

« Hé Garfield, tu veux voir le monde en tête à tête ? » « Non »
« Ok, voilà. »
« Par les os de Crom’s. Ce chat ne sait vraiment pas s’amuser ! » « Où est le repas ? »

Et puis, avec les Garfield Minus Garfield sont apparus des choses plus étranges, comme Garfield as Garfield, où Garfield est remplacé par James Abram Garfield (20eme président des USA)

« Excepté ce sac… »
« nous sommes en pénurie de chips. »
« Seul les radicaux peuvent accomplir quelque chose en période de grande crise. »

Et d’autres qui permettent une fois de plus sur les problèmes d’un comic-strip qui a du mal à se renouveler au fil des années.

Garkov, un générateur de texte automatique qui permet de mettre des textes aléatoirement dans des bds de Garfield. Et parfois, ça prend sens.

« Tu sais. »
« Si tu ne l’avais pas vu, ça ne serais jamais arrivé. »

Ou bien ce générateur automatique de gags de Garfield dans lequel les cases sont posées aléatoirement…

« Haaa, mon pied. »

Autre expérience, Barfield Loose his Lunch, un retravail des planches de Garfield de sorte à raconter des trucs grossiers et vulgaires, et suit l’histoire d’un chat qui vomis, n’a plus qu’une semaine à vivre et meurt.